• A.− PHILOS. [En parlant de l'enseign. philos.] Qui est réservé aux seuls initiés. Doctrine ésotérique de Platon (cf. P. Leroux, Humanité, t. 2, 1840, p. 382).
    B.− P. ext. [En parlant d'un comportement, d'une œuvre ou d'un aut.] Accessible à un cercle restreint d'auditeurs, d'accès difficile. Poésie ésotérique. J'avais rencontré, dans un immense salon plein d'objets d'art, Jean Baruzi et son frère Joseph, auteur d'un livre ésotérique (Beauvoir, Mém. j. fille, 1958, p. 262).
    Rem. La docum. atteste
    a) Ésotériquement, adv. rare. Secrètement. L'autre ne devait-il pas être plus particulièrement un docteur (...); plus occupé d'ailleurs de posséder ésotériquement la vérité que de la répandre (...)? (P. Leroux, op. cit., p. 835).
    b) Ésotériser (s'), verbe pronom. Demeurer secret. J'ai le sentiment écœurant d'ailleurs que ce serait, dans cette lettre mystérieuse, « encore la même chose. » Même sous l'enveloppe elle ne s'ésotérise qu'extérieurement (Gide, Corresp. [avec Valéry], 1891, p. 98).
    Prononc. et Orth. : [ezɔteʀik]. Ds Ac. dep. 1878.
    Étymol. et Hist. 1752 ezotérique (Trév. Suppl.). Empr. au gr.ἐσωτερικός « de l'intérieur, de l'intimité; réservé aux seuls adeptes ». Fréq. abs. littér. : 61. Bbg. Quem. DDL t. 1.

  • HERMÉTISME, subst. masc.

    A. − Ensemble de doctrines ésotériques qui sont censées constituer la révélation du dieu égyptien Thot (auquel les Grecs donnèrent le nom d'Hermès Trismégiste) et qui donnent certaines bases à l'alchimie du Moyen Âge; p. ext., philosophie hermétique, alchimie. Canches possédait des connaissances extraordinaires dans les domaines de l'hermétisme et de la kabbale (Caron, Hutin, Alchimistes, 1959, p. 10).
    P. ext. Savoir occulte, ésotérique. Le devin ne peut se situer hors du temps (...) qu'en menant la vie de solitude et de méditation des grands initiés; qui dit initiation dit hermétisme (Morand, Excurs. immob., 1944, p. 8) :
    Cependant, subsiste la vieille et toujours renaissante habitude de certains savants, qui créent un milieu à eux pour en exclure les non initiés et faire croire à la nouveauté sous couleur d'un langage à part. Dans la science et l'enseignement, cette forme atténuée de l'hermétisme doit être condamnée au même titre que l'hermétisme lui-même; avec la précision du français, il serait impardonnable que notre parler scientifique soit incompris...
    Marin, Ét. ethn., 1954, p. 6.
    B. − Caractère de ce qui est difficile ou impossible à comprendre et/ou à interpréter. Synon. obscurité. Si j'avais de ces napoléons qu'on nomme des louis, ce qui prouve la légitimité des Bourbons, rien n'égalerait l'ésotérisme, l'hermétisme de mes vocables. Je rêve la vengeance par le néologisme (Péladan, Vice supr., 1884, p. 190).
    En partic., domaine de la crit. en gén. littér., péj. Tendance artistique qui privilégie les recherches formelles au dépens de la communication d'un message ou d'un sens, qui recherche l'obscurité pour l'obscurité. L'accusation d'hermétisme, de préciosité etc... sont les signes naïfs et irrécusables des sentiments que nous avions de la noblesse et de l'altitude de l'art (Valéry, Entret. [avec F. Lefèvre], 1926, p. 124). La littérature subit l'influence des journaux quotidiens, des annonces, de la radiodiffusion (...) en se réfugiant dans l'hermétisme et le symbolisme (Arts et littér., 1935, p. 64-11).

  • HÉTÉRODOXE, adj.
    A. − RELIG. Qui s'écarte de la doctrine officiellement reçue. Anton. orthodoxe.
    Il a combattu [Priestley] l'école écossaise; il est aussi théologien, et théologien hétérodoxe, comme vous pouvez le penser (Cousin, Hist. philos., t. 1, 1829, p. 37). L'alchimie ne devait pas tarder à s'associer tant au soufisme sunnite qu'au chiisme et aux gnoses musulmanes hétérodoxes (Caron, Hutin, Alchimistes, 1959, p. 118) :
    Chaque fois qu'il est positivement informé que qui que ce soit cherche à troubler l'église du royaume par des prédications, des enseignements ou des écrits hétérodoxes, au moyen du prosélytisme ou de toute autre manière, le saint synode demande à l'autorité civile la répression du mal...
    About, Grèce, 1854, p. 266.
    Emploi subst. Je crois néanmoins que leur vie intérieure [des Jansénistes] reste foncièrement catholique, et c'est pourquoi nous leur faisons, sans hésiter, leur juste place dans cette histoire où les hétérodoxes ne sont pas admis (Bremond, Hist. sent. relig., t. 4, 1920, p. 320).
    B. − P. ext. Qui ne se conforme pas aux opinions, aux idées traditionnelles ou communément admises dans un domaine donné. Synon. dissident, indépendant; anton. conformiste.
    J'aboutis à des conclusions plastiques et doctrinales stimulantes, bien que scandaleusement hétérodoxes (Gds cour. pensée math., 1948, p. 484). Et ne sont-ce pas les cubistes hétérodoxes qui, dans la mesure précisément où ils secouaient l'emprise du cubisme, ont cheminé vers l'art abstrait? (Dorival, Peintres xxe s., 1957, p. 118).